Dans un contexte budgétaire tendu, alors que la Belgique s’apprête à voter l’une des réformes les plus structurelles de ces dernières décennies — la loi-programme 2025 — une faille du règlement parlementaire a été utilisée comme levier d’obstruction.
Et pour la première fois, cette stratégie a été rendue possible grâce à la complicité de l’extrême droite, brisant le cordon sanitaire, un tabou politique majeur dans notre pays.
Une réforme majeure prise en otage
La loi-programme 2025 n’est pas un texte ordinaire. Elle contient des mesures ambitieuses visant à redresser les finances publiques de notre pays qui est confronté à un déficit structurel inquiétant.
Quant aux partis de gauche, ils dénoncent un désengagement de l’État social. Le débat est légitime, mais il a pris une tournure interpellante sur la forme.
L’arme discrète du renvoi au Conseil d’État
En vertu des règles parlementaires, tout amendement substantiel à un projet de loi peut être renvoyé au Conseil d’État pour avis juridique, à condition qu’un tiers des membres de l’assemblée en fassent la demande. Ce mécanisme est censé garantir la sécurité juridique des lois et peut être activé à chaque nouvel amendement.
Et c’est là que le “carrousel” parlementaire entre en jeu : en multipliant les amendements légèrement différents, une opposition peut provoquer une série de renvois successifs au Conseil d’État, paralysant ainsi l’examen du texte — sans aucune limite formelle, ni dans le nombre de renvois, ni dans la durée totale du blocage.
La modification de la loi APD que j’avais proposée au parlement i y a quelques années en avait fait les frais en étant reportée via ce carroussel pendant de long mois.
Une stratégie d’obstruction… avec la voix de l’extrême droite
Ce qui aurait pu rester un jeu d’équilibre classique entre majorité et opposition a pris une tournure inédite. Lors de l’examen de la loi-programme 2025, les partis PS, PTB, Écolo et DéFI ont uni leurs voix pour atteindre le tiers nécessaire au renvoi des amendements. Problème : ils n’étaient pas assez nombreux.
C’est alors qu’est intervenue une alliance de circonstance, lourde de sens : le Vlaams Belang, parti d’extrême droite habituellement tenu à l’écart des alliances politiques, a apporté ses voix pour atteindre le seuil décisif.
En rompant le cordon sanitaire, l’opposition a ouvert une brèche démocratique, permettant au “carrousel des renvois” de se mettre en route… grâce à l’appoint de l’extrême droite.
Une légalité qui heurte la légitimité démocratique
L’ensemble de la manœuvre est légal. Mais elle soulève une double question de fond :
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Une faille procédurale : le règlement ne limite pas les renvois successifs. Tant qu’un amendement diffère — même marginalement — du précédent, il peut être soumis à nouveau au Conseil d’État. Ce qui permet de ralentir indéfiniment l’adoption d’un texte, sans débat de fond.
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Une fracture politique : le recours tactique à l’extrême droite, même pour une cause jugée “noble”, rompt un consensus politique fondamental dans notre démocratie parlementaire. Car on ne peut défendre l’État de droit tout en affaiblissant ses digues morales.
Et maintenant ? Réformer, pour préserver
Cette situation révèle l’urgence d’une réforme du règlement parlementaire :
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Limiter le nombre total de renvois par texte ou par article.
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Exiger une modification réellement substantielle pour tout nouvel amendement soumis.
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Introduire une procédure de filtrage par le Bureau ou la conférence des présidents pour éviter les abus manifestes.
Il ne s’agit pas d’affaiblir les droits de la minorité. Mais de préserver la légitimité du débat parlementaire, sans que les procédures deviennent des armes, ni les principes des alibis.
Une leçon politique
Ce qui s’est passé avec la loi-programme 2025 dépasse le cas particulier. C’est un signal d’alarme : les règles du jeu démocratique ne sont pas neutres, et leur instrumentalisation peut avoir des conséquences profondes sur la confiance des citoyens, sur l’efficacité des réformes, et sur la solidité des digues démocratiques.
Quand une majorité cherche à agir, et qu’une minorité choisit de bloquer — non par la conviction, mais par la tactique — c’est toute l’institution parlementaire qui vacille. Nous devons en tirer les leçons.
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