Le Palais de justice de Bruxelles est un édifice exceptionnel. Trop souvent, nous passons devant lui sans y prêter l’attention qu’il mérite, alors qu’il s’agit d’un bâtiment emblématique, partie intégrante de notre histoire et du skyline de Bruxelles. Il devrait être une source de fierté nationale.

Conçu par l’architecte Poelaert dans une logique de gigantisme, il incarne à la fois la grandeur et la complexité. Le seul reproche que l’on puisse adresser à son concepteur est d’avoir imaginé un monument aussi démesuré sans anticiper la difficulté de sa maintenance.

Au fil du temps, des apports architecturaux sont venus compliquer davantage son entretien. Les cours intérieures, initialement prévues pour l’évacuation des eaux, ont été réaménagées, modifiant la logique de circulation. Les techniques spéciales, pensées pour un bâtiment d’une certaine configuration, se révèlent aujourd’hui problématiques. De nombreuses canalisations sont enfouies et difficilement accessibles. À cela s’ajoutent les évolutions climatiques : des pluies plus abondantes et concentrées saturent désormais les systèmes d’évacuation, provoquant des infiltrations répétées.

Face à ce constat, il n’existe pas aujourd’hui de radiographie complète des techniques spéciales du bâtiment. C’est pourquoi, lorsque j’étais du dossier, j’avais pris la décision d’ordonner et de commander un marché pour établir ce diagnostic global, indispensable à la mise en œuvre de solutions durables. J’aurais préféré disposer au préalable d’une vision claire de la justice quant à l’utilisation future du bâtiment. Après deux années d’attente, n’ayant reçu aucune réponse, j’ai décidé d’agir malgré tout.

Je sais que certains attendaient de moi des résultats immédiats. Mais mon objectif n’a jamais été de colmater une fuite ici ou là. Ce serait absurde : le problème est structurel, et sans s’attaquer aux causes profondes, il réapparaîtra. Mon mandat n’a pas été consacré au « bling-bling », mais à jeter les fondations de solutions solides et durables. C’est comme cela que je travaille, que j’ai toujours travaillé, et que je travaillerai encore.

Je comprends l’impatience. Mais cette culture de l’immédiateté est précisément ce qui, trop souvent, empêche notre pays de résoudre ses problèmes structurels. Construire un édifice solide demande du temps. Ceux qui critiquent cette temporalité sont aussi responsables, à leur manière, que ceux qui proposent des solutions rapides mais illusoires.

Aujourd’hui, le marché que j’ai initié est en cours, et j’ai la conviction qu’il permettra enfin de dégager des solutions durables pour préserver ce monument unique.

Il en va de même pour les façades et les échafaudages. Après quarante ans d’attente, j’avais pris la décision de lancer les travaux nécessaires. Je savais très bien que je ne serais pas sur la photo de l’inauguration, et que l’on me reprocherait de ne pas avoir « terminé ». Mais l’essentiel n’est pas là. L’essentiel est de savoir que sans le travail accompli avec mes collaborateurs, le chantier n’aurait même jamais débuté.

Je ne cherche pas une reconnaissance personnelle. Ce que je souhaite, c’est lancer un appel à mes collègues, notamment la Ministre Matz, qui m’a succédé dans ces fonctions : cessons de travailler pour la durée d’un mandat, travaillons comme des maillons d’un temps perpétuel. Car seul le temps long permettra au Palais de justice de Bruxelles, et plus largement à nos institutions, de retrouver leur grandeur et leur solidité.

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